Et si on parlait de X/Twitter ?

L’emmerdification de X/Twitter

Ferrisson est présent sur différents médias sociaux populaires, afin de partager cette mémoire collective que nous tâchons de réunir pour que les luttes sociales soient visibles et connues.

Pour nous, ces luttes sont à l’origine de progrès sociaux et nous pensons que les témoignages des personnes qui les ont menées, pour qui ces batailles et cette implication sociale ont été au cœur de leur vie, est un devoir de mémoire que nous voulons diffuser en utilisant les moyens à notre disposition.

Tournure toxique

Malgré notre optimisme de nature, nos valeurs sont de plus en plus confrontées à la tournure que prennent certains médias sociaux. Nous en ressortons déçus, froissés et souvent en colère. C’est ce qui nous arrive avec Twitter, devenu X entre les mains d’Elon Musk. Les propos réactionnaires, violents, racistes, masculinistes, d’extrême droite et quoi encore qu’on peut y lire nous atteignent en plein cœur. En toute conscience, nous ne pouvons pas continuer d’y être présents. Nous ne pouvons pas tacitement, par notre utilisation de ce réseau, endosser cette tendance. Il n’y a aucune modération efficace des propos extrémistes sur X/Twitter, et donc aucune chance de tempérer les propos sans allure. Nous sommes pour la liberté d’expression, mais ce principe ne cautionne pas tous les propos malsains, sinon toxiques, que nous y lisons.

C’est ce que plusieurs observateurs appellent l’emmerdification (enshittification) de X/Twitter.

Alors, en respect de nos valeurs, nous cesseront de publier sur ce réseau, devenu invivable, bien que nous avions aimé le concept qui était à l’origine Twitter, une sorte de canal d’actualité en direct que les médias, les journalistes et les politiciens, mais aussi tout un chacun, appréciaient.

L’alternative

Y a-t-il un autre réseau équivalent, qui collerait davantage à notre vision des choses et qui offre ce même genre d’approche de canal de partage d’actualité, mais qui éviterait les excès hors contrôle que nous présente désormais X/Twitter?

Il y a au moins trois alternatives qui s’offrent à nous. Threads, Bluesky et Mastodon.

Threads. Ce réseau, qui semble avoir été créé en vitesse alors que Musk prenait le contrôle de Twitter, est un bloc de plus dans l'univers de Mark Zuckerberg, c’est-à-dire l’empire Meta, que nous connaissons pour ses réseaux Facebook, Instagram et Whatsapp. Le produit est d’ailleurs dirigé par Adam Moseri, le boss d'Instagram.

Ce n'est pas vraiment un remplaçant de Twitter à notre avis. C'est une espèce d'hybride entre Instagram et Twitter, difficile à cerner en termes d’élément distinctif sur le marché. Le seul avantage, c'est qu'il permet de mettre des liens et de faire des "threads" - comme son nom l'indique – c’est à dire des discussions en cascade dans lesquelles on finit par se perdre dans toutes sortes de propos qui finissent par diverger dans tous les sens.

La modération semble approximative, voire nulle et la construction du fil d’actualité est sous l’égide d’un tout-puissant algorithme, tout comme c’est le cas sur Facebook et Instagram.

La question qui se pose : avons-nous envie d’encourager un autre produit de l’empire Meta ?

Bluesky. Cette plateforme a l'avantage de fonctionner sur le principe de Twitter à ses débuts : avec un fil d’actualité sans algorithme (le fil de nos abonnements) et sans publicité, du moins pour l’instant. Il a été initié par Jack Dorsey, cofondateur de Twitter, qui désirait fonder une plateforme donnant un certain contrôle à ses usagers.

Le modèle de gratuité sur le web, de son idéalisme d’ouverture et de partage du début de la révolution Internet, a été rejoint par la réalité économique quand tout le monde a réalisé qu’il fallait faire ses frais ou trouver une forme de retour sur investissement. On peut s'attendre à ce qu'une certaine forme de monétisation arrive sur cette plateforme, actuellement soutenue par des fonds d’investissements et du capital de risque.

Bien que Dorsey ait quitté le conseil d’administration de Bluesky en mai de cette année, on peut espérer que sa vision persiste. Si on se fie à une autre plateforme qu'il a créé il y a un certain temps (Medium), il y avait mis en place un modèle d'abonnement mensuel qui permet d'avoir un accès complet au contenu, conjugué avec un modèle de rémunération de créateurs choisis. Et certains des contenus demeurent accessibles gratuitement. C'est ce qu’on appelle généralement un modèle freemium (en partie gratuit, avec des options payantes). Il serait sans doute logique de s'attendre à un modèle similaire pour Bluesky.

Mastodon. Sur le principe, le modèle qui sous-tend ce réseau est fondé sur une approche communautaire et solidaire. Décentralisé et n'appartenant à personne, sans publicité. Fondé sur des concepts similaires à l'open source et au logiciel libre et financé sur les dons et les fondations. Mastodon existe depuis 2016-2017 et s’articule autour d’un standard baptisé ActivityPub, qui permet une communication de contenu entre différents serveurs. Sans tomber dans l’exposé technique, il faut savoir qu’on peut ainsi s’abonner à des gens qui publient des billets de microblogues (Mastondon et autres), des critiques de livres (Bookwyrm), des vidéos (Peertube), des photos (Pixelfed), etc., et de réunir le tout dans un même fil d’actualité.

La modération y est plus efficace (trop disent certains), chaque administrateur de serveur exposant clairement les règles de modération (voir celles du réseau Mastodon.social) qui seront appliquées sur le serveur auquel vous vous connectez et les publications rapportées par les utilisateurs sont analysées à la lumière de ces règles.

Alors, que choisir ?

Nous sommes déjà présents sur Mastodon, sans tambour ni trompette, depuis novembre 2022. Nous y bâtissons tranquillement notre réseau et, en cessant de publier sur Twitter, nous voulons y consacrer désormais plus de temps. Ce réseau est beaucoup mieux aligné sur nos valeurs, fonctionnant sur le soutien de ses utilisateurs, comme nous.

Petit plus, un des concepteurs du standard ActivityPub est un montréalais d’adoption, Evan Prodromou. Les observateurs des technos se souviendront peut-être qu’il était derrière le réseau identi.ca en 2008.

Après réflexion, nous avons décidé de tenter l’aventure Bluesky, vous nous retrouverez ici, comme des millions de personnes qui ont déserté X/Twitter ces dernières semaines, pour beaucoup depuis l’élection de Trump et l’appui indéfectible de Musk à son égard.

Nous resterons toutefois alertes à l’évolution de ce réseau que nous n’hésiterons pas à quitter s’il subit lui aussi une évolution vers l’emmerdification…

Merci de votre compréhension et au plaisir de vous retrouver sur nos réseaux.